Abdel Aouacheria est chargé de recherche au CNRS à l’Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier. Biologiste spécialiste de la mort cellulaire, il s’intéresse à la transversalité de la notion de mort.
Joachim Daniel Dupuis est professeur en classes préparatoires à Lille. Docteur en philosophie et historien du cinéma, il est l’auteur du livre George A. Romero et les zombies. Autopsie d’un mort-vivant (L’Harmattan, 2014).
Tous deux ont co-écrit « La Biopolitique vue du cinéma. L’âge de cristal » (L’Harmattan, 2018), livre d’étude filmique sur le thème de la destruction apocalyptique du monde. Ils interviennent dans les médias et auprès du grand public sur ces thématiques.
Le zombisme dans tous ses états Venus du vaudou, popularisés au cinéma par le film de George A. Romero La Nuit des morts-vivants (1968), puis propulsés au firmament grâce au clip Thriller de Michael Jackson (1983), les zombies évoluent plus que jamais aux côtés des humains à travers diverses séries disponibles sur petit écran (comme The Walking Dead) ou en jeux vidéo (Resident Evil). Ce « phénomène Z » a pris une telle ampleur que le gouvernement américain a édité un plan à déployer en cas d’apocalypse zombie. On peut se demander aujourd’hui si l’imaginaire du mort-vivant n’a pas percolé dans toutes les strates de notre rapport au réel (du zombie philosophique aux cellules-zombies de la biologie contemporaine). Après avoir donné quelques repères sur sa généalogie, nous interrogerons la portée symbolique (extrêmement riche) de la figure du zombie et son rôle de révélateur de l’évolution de nos sociétés (en particulier dans leur rapport au corps, à l’identité et à la mort). Nous discuterons également l’intérêt épidémiologique, sanitaire, éducatif et cognitif de l’expérience de pensée consistant à mettre en scène, sous une forme hyperbolique, l’existence d’une menace zombie. Si la notion de mort-vivant se développe essentiellement dans la dimension politique et de la métaphore, nous verrons que des formes « naturelles » de zombification peuvent toutefois être retrouvées chez certains animaux (dans des relations hôte-pathogène) ou dans des conditions pathologiques (avec l’apparition de « caractéristiques » propres aux zombies). Le zombie, figure achevée de l’alter ego pas très présentable, n’a pas fini de nous surprendre, jusqu'à nous en apprendre sur nous-mêmes.